La circulaire du 29 septembre 2022 sur la hausse des prix dans les contrats de la commande publique : une sensibilisation des acteurs publics aux contraintes des entreprises

Dans le contexte actuel de hausse des prix de certaines matières premières, la Première Ministre a présenté, le 29 septembre 2022, une nouvelle circulaire n°6374/SG relative à l’exécution des contrats de la commande publique.

Matthieu KLUCZYNSKI, avocat associé du cabinet ADMYS Avocats répond aux questions d’ACP Formations sur cette circulaire. 

 

ACP Formation : Dans quel contexte intervient cette circulaire du 29 septembre 2022 ? 

Matthieu KLUCZYNSKI, ADMYS Avocats : Cette circulaire prolonge le cadre législatif de la modification des contrats de la commande publique, qui actuellement ne cesse d’évoluer (voir l’article précédent sur le thème, « De la modification à l’imprévision : tour d’horizon des outils proposés par le Conseil d’Etat pour faire face à la flambée des prix ! », 29 septembre 2022, M. Kluczynski).

Plus précisément, la circulaire du 29 septembre tire les conséquences de l’avis du Conseil d’Etat du 15 septembre 2022 et abroge la circulaire « Castex » du 27 mars 2022. Elle fait donc état de l’interprétation jurisprudentielle de la modification des contrats de la commande publique et présente aux préfets les recommandations en matière d’exécution. 

 

ACP Formation : Quelle est sa valeur juridique ? 

Matthieu KLUCZYNSKI, ADMYS Avocats : La circulaire est un acte administratif à volonté instructive ayant une valeur infra-réglementaire. Une circulaire vise donc à préciser le droit et non à créer une règle nouvelle.

 

ACP Formation : Comment s’articule cette circulaire avec l’avis du Conseil d’Etat du 15 septembre 2022 ? 

Matthieu KLUCZYNSKI, ADMYS Avocats : A la différence de la circulaire du 27 mars 2022, la circulaire « Borne » intègre l’avis du Conseil d’Etat et surtout la possibilité d’une modification « sèche » des clauses financières du contrat, c’est-à-dire portant uniquement sur le prix, ses modalités d’évolution ou les conditions de rémunération de l’opérateur économique.

En principe, il existe une intangibilité du prix dans les marchés publics, et notamment en raison des « principes de libre accès à la commande publique et d’égalité de traitement des candidats ». 

Cependant, en raison de circonstances ne pouvant être raisonnablement envisagées lors de la passation du contrat, des modifications des seules clauses financières des contrats sont possibles. Elles sont alors strictement encadrées et se limitent à ce qui est rendu nécessaire afin d’assurer la continuité du service public.

La circulaire insiste surtout sur la nécessité de prendre en compte l’évolution des prix et le contexte économique, en rappelant notamment l’obligation d’introduire dans la plupart des marchés des clauses de révision afin de tenir compte des fluctuations économiques. 

En effet, la nécessité d’assurer une relation « équilibrée » dans le contexte actuel est par exemple illustrée par l’obligation d’inclure une référence aux indices officiels de fixation des cours pour les marchés de plus de trois mois.

 

ACP Formation : Cette circulaire présente-t-elle des nouveautés par rapport à cet avis ? 

Matthieu KLUCZYNSKI, ADMYS Avocats : La circulaire insiste également sur deux points qui n’ont pas été mis en exergue par l’avis du Conseil d’Etat précité, mais qui figurait déjà dans la circulaire « Castex » que la circulaire « Borne » remplace.

D’une part, elle rappelle qu’il est possible de résilier le contrat à l’amiable si les parties ne sont pas d’accords sur les conditions de sa poursuite, la circulaire limitant visiblement l’indemnité au montant de l’imprévision pour la partie du contrat qui lui reste à exécuter. 

D’autre part, elle prévoit le gel des pénalités contractuelles dans l’exécution des contrats de la commande publique à l’instar des mesures prises pendant la crise sanitaire. 

 

ACP Formation : Quelle conclusion tirer de cette circulaire ? 

Matthieu KLUCZYNSKI, ADMYS Avocats : Force est de constater que cette circulaire porte une volonté de sensibilisation des acheteurs publics aux difficultés économiques réelles que peuvent subir les opérateurs économiques lors de l’exécution de contrats de la commande publique. 

Son objectif clair est ainsi de favoriser le recours aux outils proposés et validés par le Conseil d’État allant de l’avenant à l’application de l’imprévision.