L'absence d'évaluation environnementale pour la mise en compatibilité d'un PLU ne peut justifier l'illégalité d'un projet subséquent

Il est ADMYS, par un arrêt du Conseil d’État du 5 février 2024 n° 463620, que le vice tiré de l’absence d’évaluation environnementale à l’occasion de la mise en compatibilité d’un plan local d’urbanisme (PLU) est sans incidence sur la légalité de l’autorisation d’urbanisme délivrée sur son fondement, dès lors que le projet a lui-même fait l’objet d’une telle évaluation.

 

En l’espèce, par un arrêté du 23 novembre 2019, le préfet du Doubs avait délivré à une société d’exploitation d’éoliennes une autorisation unique pour exploiter un parc éolien composé de huit aérogénérateurs et deux postes de livraison et défricher un hectare de parcelles boisées.

 

Le PLU de la commune avait fait l’objet d’une mise en compatibilité afin de permettre l’installation d’éoliennes dans les zones A et N. L’autorité environnementale avait alors considéré qu’il n’était pas nécessaire de mener une évaluation environnementale, dès lors que le projet lui-même était déjà soumis à une telle évaluation.

 

L’article R. 104-14 du Code de l’urbanisme prévoit en effet que les PLU doivent faire l’objet d’une évaluation environnementale à l’occasion notamment de leur mise en compatibilité dans le cadre d’une déclaration d’utilité publique ou d’une déclaration de projet s’il est établi, après un examen au cas par cas, que ces procédures sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement.

 

Des riverains et des associations de protection du patrimoine et des paysages avaient alors saisi la Cour administrative d’appel (CAA) de Nancy – compétente en premier et dernier ressort pour connaitre de la légalité de cet arrêté en vertu de l’article R. 311-5 du Code de justice administrative – pour en demander l’annulation. Ils soutenaient notamment que la mise en compatibilité du PLU aurait dû faire l’objet d’une évaluation environnementale.

 

Par un arrêt du 8 mars 2022, la CAA a jugé que la mise en compatibilité aurait dû être précédée d’une évaluation environnementale et, faisant application de la célèbre jurisprudence Danthony, que l’absence de ce document avait privé requérants d’une garantie et exercé une influence directe sur les règles d’urbanisme applicables au projet.

 

Mais le Conseil d’État, dans sa décision du 5 février 2024, a cassé l’arrêt de la CAA.

 

D’une part, il a estimé que l’évaluation environnementale pour la mise en compatibilité du PLU aurait eu le même objet que celle qui a été réalisée pour le projet éolien et que cette dernière avait été jointe au dossier d’enquête publique, permettant d’assurer l’information du public.

 

D’autre part, quant à l’influence sur le sens de la décision prise, le Conseil d’État a tout d’abord visé l’article L. 600-12-1 du Code de l’urbanisme, qui dispose que la déclaration d’illégalité d’un PLU est par elle-même sans incidence sur l’autorisation d’urbanisme dès lors que cette déclaration d’illégalité repose sur un motif étranger aux règles d’urbanisme applicables au projet.

 

Il a ensuite rappelé la règle qu’il avait dégagée dans son avis de section SCI du Petit Bois du 2 octobre 2020 n° 436934 qui définit ce qu’il convient d’entendre par « motif étranger » au sens de ces dispositions, à savoir les vices de légalité externe du PLU, sauf ceux qui ont été de nature à exercer une influence directe sur des règles d’urbanisme applicables au projet.

 

Il a estimé qu’en l’espèce, l’absence d’évaluation environnementale concernait les règles du PLU qui n’étaient applicables qu’aux parcelles extérieures au projet de parc éolien. Elle constituait donc un vice de légalité externe étranger aux règles d’urbanisme applicables au projet, sans incidence sur la légalité de l’autorisation en litige.

 

Ainsi, considérant que l’absence d’évaluation environnementale au titre de la mise en compatibilité du PLU n’avait pas privé les requérants d’une garantie et constituait un vice de légalité externe étranger aux règles d’urbanisme applicables au projet, le Conseil d’État e a annulé l’arrêt de la CAA pour erreur de droit.

 

Par cette décision, la Haute juridiction administrative admet que la mise en compatibilité d’un PLU puisse faire l’objet de la même évaluation environnementale que celle prévue pour le projet, dès lors que l’évaluation est jointe au dossier d’enquête publique et que les règles modifiées du PLU ne sont pas applicables au projet.