Quel niveau d'information quant à la méthode de notation des offres et à l'utilisation des décimales dans la notation ?

Par une décision en date du 24 novembre 2023, le Conseil d’État réaffirme sa jurisprudence quant au degré d’information des candidats à l’attribution d’un marché public sur la notation de leurs offres et précise que le pouvoir adjudicateur peut traduire appréciations littérales de critères par des notes comportant des décimales.

 

En l’espèce, la Communauté d’agglomération Saint-Malo Agglomération a passé un marché public selon la procédure formalisée avec négociation, ayant pour objet l’achat de vélos à assistance électrique et le déploiement et la gestion d’un service public de location de ces vélos en libre-service. La Société Fifteen a été déclarée attributaire et la Société Ecovélo a été classée deuxième. La notation des offres s’était notamment faite au regard du critère technique, pondéré à 60 sur 100 et apprécié au regard de quatre sous-critères affectés des notes de 25, 25, 5 et 5 points. Les notes de chaque sous-critère comportaient, en sus, des décimales pour chaque élément d’appréciation, allant de « insatisfaisante » à « performante”

 

A l’occasion d’un référé précontractuel, cette dernière a sollicité du tribunal administratif de Rennes, l’annulation de cette procédure. Par une ordonnance du 18 avril 2023, le juge du référé a fait droit à la requête, au motif de l’erreur matérielle ou à tout le moins de l’incohérence de la note de la Société évincée, dès lors que sa note sur le critère susmentionné comportait des décimales.

 

Saisi par Saint-Malo Agglomération et par l’attributaire, le Conseil d’État a censuré ce raisonnement en rappelant, selon sa jurisprudence constante :

  • d’une part que l’acheteur dispose d’une liberté dans la définition des critères et les sous-critères sur lesquels il souhaite noter les offres si ces éléments sont portés à la connaissance du candidat ;
  • d’autre part que la méthode de notation est libre et n’a pas à être précisée dans les documents de la consultation, pourvu qu’elle soit cohérente et qu’elle prenne en compte des éléments d’appréciation en lien avec lesdits critères.

 

Sur ce point, les multiples décisions d’espèce s’accordent à entériner ce principe et à rejeter les contestations portant sur les méthodes de notation dont il n’est pas établi qu’elles auraient par exemple permis « d’attribuer de manière plus exacte la meilleure note au candidat ayant proposé les prix les plus bas » (voir en ce sens TA de Paris, 23 novembre 2020, Société SFR, req n°2017552).

 

La Juridiction a indiqué que rien ne s’opposait « à ce que le pouvoir adjudicateur traduise des appréciations littérales par des notes comportant des décimales », une telle méthode n’ayant en l’espèce pas « priv[é] de leur portée les critères [ni] neutralis[é] leur pondération ».

 

Le juge s’efforce de maintenir un équilibre subtil entre la marge de manœuvre reconnue au pouvoir adjudicateur dans la manière dont il aborde la notation des offres et l’information appropriée des candidats sur les critères d’attribution d’un marché public.