Hiérarchisation entre les notions de modifications 'substantielles' et 'importantes' en matière de prolongation de la DLRO

Il est ADMYS qu’en matière de prolongation du délai de réception des offres, une modification du DCE en cours de consultation qualifiée de « substantielle » constitue par essence une modification « importante » au sens de l’article R.2151-4 du Code de la commande publique (« CCP ») imposant un délai supplémentaire.

La décision CE, 24 mars 2025 Préfet de police de Paris req. n°499221 vient utilement rappeler les modalités de prolongation des date et heure limites de remise des offres (plus communément abrégées « DLRO ») en présence de modifications du DCE lors d’une consultation (i), tout en instaurant une hiérarchisation entre les notions de modifications « substantielles » et « importantes » (ii).

En premier lieu, sans reprendre ici toutes les dispositions du CCP relatives au délai de remise d’une offre, il est intéressant de s’attacher spécifiquement aux règles encadrant une éventuelle prolongation de la DLRO. En effet, en vertu de l’article R.2151-4 du CCP, le délai de réception des offres doit être prolongé dans deux cas distincts :

  • Cas n°1 : Lorsqu’un complément d’informations nécessaire à l’élaboration de l’offre n’est pas fourni dans le délai de six jours avant la DLRO (sauf urgence) en procédure formalisée, à la condition que la demande initiale ait été déposée à temps
  • Cas n°2 (objet du présent commentaire) : Lorsque des modifications importantes sont apportées aux documents de la consultation.

Ainsi, lorsque l’acheteur prolonge ce délai de réception, il doit veiller à ce que la nouvelle durée soit proportionnelle à l’importance des informations ou des modifications.

En second lieu, le Conseil d’État détaille le degré de son contrôle en cassation et sa manière d’apprécier la mise en œuvre de l’article R.2151-4 du CCP, tout particulièrement dans le cadre du 2nd cas précité :

  • tout d’abord, il rappelle que l’appréciation du caractère « important » de la modification relève d’une analyse souveraine des juges du fond ;
  • ensuite, il précise qu’en cassation, son contrôle est restreint, puisqu’il s’astreint simplement à vérifier que l’appréciation est exempte de dénaturation.
  • enfin, si l’article R.2151-4 du CCP exige a minima l’existence de modifications « importantes » pour imposer une prolongation obligatoire dudit délai, la Juridiction en déduit qu’une modification qualifiée de « substantielle » est par nature une modification « importante » au sens de l’article R.2151-4 du CCP : « Si le préfet de police soutient que la juge des référés a commis une erreur de droit en qualifiant la modification de substantielle alors que les dispositions de l’article R. 2151-4 du code de la commande publique citées au point précédent imposent la prolongation du délai de remise des offres en présence de modifications importantes, cette erreur est restée sans incidence sur la caractérisation du manquement, une modification substantielle étant nécessairement importante et imposant, par là-même, à l’acheteur de prolonger le délai de remise des offres ».

En ce sens, le Conseil d’État établit donc une hiérarchisation nette : la modification « substantielle » est positionnée à un niveau supérieur par rapport à la modification « importante » sur l’échelle de l’influence des changements sur le contenu du DCE. A l’inverse, toute modification « importante » n’est pas automatiquement qualifiable de « substantielle ».

En définitive, la prolongation du délai de réception des offres s’impose nécessairement dès lors que la modification est « importante », et à plus forte raison lorsque cette dernière est « substantielle ».

Julie Creveaux
Avocate associée
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