Contrairement au domaine public, le régime des autorisations d’occupation du domaine privé n’est pas détaillé au sein du Code général de la propriété des personnes publiques (ci-après, CGPPP).
Si, depuis 2017, une procédure de sélection préalable est obligatoire lorsque l’autorisation est délivrée en vue d’une exploitation économique (article L. 2122-1-1 du CGPPP), ces dispositions ne valent que pour le domaine public.
Une telle obligation n’est pas prévue par le Code concernant la gestion du domaine privé qui, à la lecture de l’article L. 2221-1, paraît assez libérale :
« Ainsi que le prévoient les dispositions du second alinéa de l’article 537 du code civil, les personnes publiques mentionnées à l’article L. 1 gèrent librement leur domaine privé selon les règles qui leur sont applicables. ».
Dans ce contexte, le Conseil d’État a d’ailleurs considéré que les personnes publiques n’étaient pas tenues d’organiser une procédure de mise en concurrence préalablement à la conclusion d’un bail portant sur des biens de leur domaine privé (CE, 2 décembre 2022, Commune de Biarritz, n° 460100).
Cette décision ne clôt toutefois pas le débat.
En effet, le droit de l’Union européenne, à la différence du droit français, ne procède pas à une distinction entre le domaine public et le domaine privé.
Ainsi, l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 14 juillet 2016 « Promoimpresa Srl »(C-458/14 et C-67/15)a précisé, en interprétant l’article 12 de la directive européenne « Services » du 12 décembre 2006, que l’octroi d’autorisations, lorsque leur nombre est limité en raison de la rareté des ressources naturelles, doit être soumis à une procédure de sélection préalable entre les candidats potentiels,laquelle doit répondre à toutes les garanties d’impartialité et de transparence, notamment de publicité adéquate.
Il en a été déduit qu’en droit français, la délivrance de titres d’occupation du domaine public en vue d’une exploitation économique doit être précédée d’une procédure de sélection préalable lorsque ces titres ont un caractère limité.
C’est à la suite de cette décision que l’article L. 2122-1-1 mentionné ci-dessus a été intégré au CGPPP l’année suivante.
Or, il est légitime de se demander si la circonscription de la procédure de sélection préalable aux autorisations délivrées sur le domaine public est conforme aux exigences du droit de l’Union européenne.
Preuve en est que cette question reste d’actualité, une réponse ministérielle vient récemment d’être publiée (réponse pp. 3473-3474).
En substance, le Gouvernement n’envisagerait pas de proposer au législateur une obligation générale de mise en concurrence préalablement à la délivrance d’autorisations d’occupation du domaine privé.
Mais, en rappelant les dispositions de la directive européenne de 2006, il est recommandé aux personnes publiques de procéder à une analyse in concreto des conditions dans lesquelles l’autorisation serait délivrée en prenant en compte, notamment,les éléments suivants :
- la nature de l’activité exercée ;
- la rareté de la dépendance ;
- l’intérêt transfrontalier certain.
Par ailleurs, il est appelé à la prudence de la collectivité publique en cas de doute sur la domanialité du bien.
Conclusion
Finalement, la personne publique devrait veiller à assurer une remise en concurrence périodique de l’autorisation d’occupation en limitant sa durée et en évitant toute procédure de renouvellement automatique.
Il est douteux que cette réponse ministérielle puisse aider les collectivités publiques à sécuriser la gestion de leur domaine privé.
Le Gouvernement s’en remet d’ailleurs aux évolutions jurisprudentielles dont il « tirerait les conséquences » à l’avenir.